Refouler ses émotions, quel impact ?
Dans le labyrinthe complexe de notre être, la mémoire corporelle se profile comme un témoin silencieux de notre histoire émotionnelle. L’expérience humaine est tissée de sensations, d’émotions et de souvenirs qui s’inscrivent non seulement dans notre esprit, mais également dans les tréfonds de notre corps. Alors que se passe-t-il quand nous ne vivons pas pleinement nos émotions ? Comment cela peut-il s’inscrire dans le corps durablement ?
Le conscient – à la surface
Au sommet de notre conscience résident les émotions que nous reconnaissons et exprimons ouvertement. La joie, la colère, la tristesse – ces états émotionnels émergent dans notre expérience quotidienne. Les émotions sont souvent associées à un type d’expérience. La tristesse va, par exemple, se manifester lors de la perte d’un être cher, d’une relation ou d’un objet à la valeur sentimentale. Alors que la colère fait son apparition lorsque nos limites sont franchies, par une personne ou par nous même parfois, qu’on ne se sent pas respecté…
L’expérience génère l’émotion. Qui génère elle-même des ressentis, pour nous faire réagir face à cette information du corps, qu’est l’émotion.
Lorsque nous les accueillons, elles peuvent être libérées/déchargées, se dissolvant comme des vagues après avoir atteint la rive. Cependant, il y a des moments où ces émotions peuvent être filtrées, modifiées, ou dissimulées, souvent en réponse à des normes sociales ou à des mécanismes d’adaptation. C’est là que commence le jeu subtil du refoulement émotionnel.
« Les émotions sont comme des signaux lumineux dans notre paysage mental, indiquant les zones qui méritent notre attention et notre compréhension. »
Le subconscient – dans les profondeurs
En dessous de la surface, dans les tréfonds du subconscient, résident les émotions qui ont été mise à l’ombre, souvent par des mécanismes de défense. Ces émotions, jugées inacceptables ou trop intenses, sont reléguées dans les couloirs sombres de l’inconscient.
La colère, la mal aimée
La colère est une émotion plutôt mal aimée dans nos sociétés. En effet, c’est cette émotion qui nous fait passer à l’action, qui nous fait nous « rebeller ». Ce qui met en lumière un phénomène intéressant : on déplore souvent l’émotion alors qu’en réalité c’est souvent notre réaction face à cette information qui est problématique. La colère n’est pas un acte violent en soi. C’est notre manière d’y réagir qui peut être violente ou agressive.
Les mécanismes de défense
Certaines fois, nous ne vivons pas nos émotions car certains de nos mécanismes de défense cherchent à nous en protéger. En effet, si tout-e petit-e, à chaque fois que vous pleuriez, vous étiez rabaissé-e par votre entourage, qu’on vous faisait comprendre que pleurer était un acte de faiblesse, il est probable qu’en grandissant vous vous interdisiez de vivre une émotion telle que la tristesse car cela est synonyme de rejet de la part de vos proches. Ainsi à chaque fois que cette alerte corporelle est lancée, votre cerveau va mettre en place une stratégie pour vous en détourner (parfois, il remplace cela par une autre émotion), mais l’émotion originelle ne sera pas traitée et va être stagnante.
Les mécanismes de refoulement peuvent prendre diverses formes. Le déni, la rationalisation, ou même l’oubli sont des moyens par lesquels notre psyché tente de préserver une stabilité apparente. Pourtant, ces émotions refoulées persistent, exerçant une influence silencieuse sur nos pensées, nos comportements, et, de manière significative, sur notre bien-être physique.
Le corps – l’empreinte physique
Le corps est un réceptacle où se déposent les empreintes de nos expériences émotionnelles. Les tensions musculaires, les nœuds, les malaises – autant de signaux du corps nous indiquant que quelque chose réside dans les profondeurs. Ces empreintes sont les vestiges physiques du refoulement émotionnel.
Le fascia
Le fascia est un tissu conjonctif qui englobe les muscles, les organes, les nerfs… en gros, chaque élément du corps humain. C’est souvent les ostéopathes qui parlent du fascia car il est constituante importante de la thérapie ostéopathique.
Ce fascia nous intéresse particulièrement en kinésiologie car il est le support de la mémoire corporelle. Lorsqu’une émotion est refoulée : l’évènement, l’émotion ainsi que les ressentis et mouvements associés vont être encodés par le cerveau et stockés dans ce tissu. Les émotions refoulées peuvent se loger dans des régions spécifiques du corps. La colère peut se contracter dans les épaules, la tristesse peut peser sur le cœur, et l’anxiété peut nouer l’estomac.
Les méridiens d’acupunture
Les méridiens d’acupuncture, sont des canaux invisibles à l’œil nu qui transportent l’énergie vitale, le Qi, à travers le corps. Chaque méridien est associé à un organe spécifique et à une fonction physiologique. L’équilibre au sein de ces méridiens est essentiel pour la santé globale. Chaque méridien a un rôle fonctionnel et est associé à des ambiances, une émotion… Par exemple, le méridien Poumon est associé à la tristesse, aux pleurs alors que le méridien Gros Intestin sera plutôt le méridien du contrôle et de la culpabilité.
Ces méridiens parcourent le corps entier, ayant des zones superficielles et ensuite plus profondes. On vient les stimuler grâce à divers points cartographiés qui permettent d’agir de manière précise. Certains points ou combinaisons de points vont être indiqués en cas de douleur physique, quand d’autres permettront de rééquilibrer deux méridiens couplés entre eux.
Comment ils coopèrent
Les méridiens véhiculent l’énergie, tandis que les fascias agissent comme des guides, permettant une communication efficace entre les différentes parties du corps. Un blocage énergétique dans un méridien peut se manifester comme une tension dans le réseau fascial. Les techniques telles que l’acupression, visent à rétablir l’équilibre énergétique dans les méridiens. Les doigts stimulent les points spécifiques, libérant les blocages et rétablissant la libre circulation du Qi à travers les méridiens et les fascias.
« Le corps garde la mémoire des expériences plus fidèlement que l’esprit. En écoutant notre mémoire corporelle, nous pouvons comprendre des vérités que l’esprit a peut-être oubliées. »
– Peter A. Levine, psychothérapeute américain
L’exploration de la mémoire corporelle nous fait voyager entre l’émotion consciente et les profondeurs inexplorées du corps et de notre inconscient. Comme si le corps était finalement une prolongation matérielle de notre part inconsciente. Ainsi, nous pouvons trouver la clé de notre propre harmonie. La mémoire corporelle est un chapitre de notre histoire que le corps raconte silencieusement. Écouter cette histoire, l’honorer avec bienveillance, et choisir de la transformer est le voyage vers plus d’unité intérieure.